Le rôle de psychothérapeute
Le rôle de psychothérapeute
Liminaire
La principale force de la PNL tient sans doute au fait qu'elle a bâti un modèle thérapeutique essentiellement ancré dans la pragmatique de la communication et de l'action.
Un des traits qui découle de ce choix est que ses concepteurs se sont prioritairement souciés de la formalisation de savoir-faire thérapeutiques immédiatement observables et pertinents dans l'instant de l'échange et de l'intervention. Comme le souligne Frank Pierobon, ces savoir-faire relèvent avant-tout d'une tradition orale et n'impliquent pas de savoirs divorcés du faire, du faire-explorer et du pouvoir-faire sans lesquels la PNL n'existerait pas.
En intention autant qu'en pratique, ces savoirs se caractérisent par le fait qu'ils permettent aux cliniciens de parler et d'agir à partir du patient, en tenant compte « pas à pas » de la manière dont celui-ci élabore son modèle du monde et ses expériences. Au-delà de sa visée fondamentalement éthique, ce parti-pris s'est, comme on le sait, surtout attaché au décodage syntactique du travail thérapeutique, en privilégiant des formes (schèmes et processus) et leurs relations mutuelles.
Dès lors, ce qui reste de la PNL quand on quitte le territoire de l'inter-relation vécue et de l'action, est un modèle - ou comme aurait pu le dire Korzybski, une « méta-carte », faite de cartes particulières, conceptuelles et procédurales qui, comme toutes les cartes, sont peu porteuses de sens pour ceux qui n'en connaissent ni la visée, ni l'usage. Même si elle a permis à beaucoup d'approches thérapeutiques et communicationnelles de se développer en intégrant, de façon souvent couverte, certaines de ses parties, la PNL reste, aujourd'hui encore, souvent incomprise.
Cette situation - qui l'isole et l'appauvrit - est sûrement entretenue par le fait qu'elle suscite peu d'écrits qui traitent de sa signification et qui, par là, donnent à penser à propos des territoires illimités qu'elle fait surgir ou transforme du côté de l'expérience subjective. À notre avis, rendre compte de la façon singulière dont la PNL opère dans ce domaine est fondamental. Et s'y atteler implique une démarche réflexive et compréhensive, établie du point de vue des acteurs et qui tient pour essentiel le fait que la PNL s'est construite et se manie en termes de formes et en s'appuyant sur un étayage expérientiel original, dont le propre est de nouer constamment trois positions perceptuelles : celle de l'écoute du vécu et de l'expérience de l'autre (psychologie en 2ème personne),
celle de l'observation « objectivante » des processus et comportements (psychologie en 3ème personne) et celle de la « simulation » intérieure des fruits de ces deux points de vue (psychologie en 1ère personne).
Le rôle de psychothérapeute en PNL
Le présent exposé tente de préciser les dimensions du rôle du thérapeute en PNL en articulant réflexion clinique et traits les plus singuliers de son approche, à savoir : intégration permanente des perspectives en 1ère, en 2ème et en 3ème personne, décryptage prioritairement syntactique et formalisation détaillée des comportements, des capacités et des techniques qui en tirent parti.
Les ouvrages de PNL qui parlent du rôle du thérapeute sont relativement rares. Malgré cela - et même si ce fut transitoire -, Bandler et Grinder ont indiqué dans leurtroisième livre (1976), que le client fait confiance au thérapeute quand il croit que celui-ci le comprend et peut l'aider à obtenir davantage de la vie, en créant pour lui des expériences qui lui permettent de modifier sa manière d'organiser et de se représenter son expérience.
Dans les écrits ultérieurs, cette façon globale de parler fut progressivement remplacée par des descriptions plus stratégiques relevant les actes que les cliniciens sont invités à poser afin de mieux parler et mieux agir à partir du patient. Cette évolution - largement dictée par les besoins de l'enseignement - fut couchée sur papier pour la première fois par L. Cameron-Bandler (1978) et par R. Dilts (1978), puis reprise par les fondateurs en 1979. Comme ce fut déjà dit dans notre liminaire, ce genre d'écrits est, par définition, analytique et schématique et passe sous silence le fait que le rôle du thérapeute en PNL implique qu'il « pilote » le processus thérapeutique jusqu'à l'atteinte des objectifs du client.
Du fait qu'elle n'a jamais été thématisée, cette vision du rôle se transmet tacitement, à l'occasion des exercices qui émaillent la formation, par le biais des noms quel'on donne à la personne qui, dans les mises en situation, occupe le rôle de clinicien. Que cette personne soit baptisée «programmeur », selon la terminologie techno-scientifique choisie par les fondateurs, ou « thérapeute », « praticien », « facilitateur » ou « guide » en fonction d'autres références, ce qui compte à nos yeux, c'est que tous ces noms accréditent le fait que, pour la PNL, la psychothérapie est une institution symbolique puissante, qui implique une relation socialement prédéterminée dont la fonction est de structurer les rôles de l'aidant et de l'aidé de façon asymétrique et complémentaire, en conférant la responsabilité et la guidance duprocessus au professionnel.
Pour spécifierce que cela signifie concrètement, nous avons choisi d'établir un « inventaire » des fonctions que le thérapeute en PNL est appelé à assurer au fil du temps, cet inventaire étant cependant à lire comme un « cycle » qui se renouvelle, en tout ou en partie, chaque fois que le clinicien progresse sensiblement dans sa compréhension du patient et dans l'atteintes d'un des objectifs poursuivis.
être le garant du cadre et du processus thérapeutique, en terme de temps et d'espace, mais aussi en termes de compétence et de responsabilité. En raison de la place centrale que la PNL accorde à la flexibilité du praticien et à la coopération du client, cette prise en charge n'est pas ritualisée a priori au niveau temps et espace, l'important étant que
la responsabilité du clinicien soit visible et assurée.
Construire le champ relationnel qui ancrera et soutiendra le travail et les échanges. Ceci suppose que le praticien entretienne un rapport fécond avec le sujet et maintienne un équilibre entre l'expression de ce dernier, la recherche d'informations et les interventions.
En PNL, un tel équilibre s'obtient grâce à une communication à niveaux multiples et un contrôle dynamique bien balancé, entre « accompagnement » et « conduite », exploration et structuration, mais également - selon les propositions de Bateson - entre tâche et relation et entre contenu et processus. De plus, il requiert du praticien une mise en conscience externe requise par l'approche en 2ème et en 3ème personne, une grande flexibilité et une capacité « d'entrer dans les chaussures » de l'autre, non seulement en termes d'empathie - comme le faisaient Satir ou Erickson -, mais également en termes de processus cognitifs et de comportements dont le praticien explore le sens par simulation en 1ère personne, en usant de « comme si », après avoir désappris à faire des projections et des « lectures de pensée ».
établir le cadre de pertinence. Sauf tout au début, où les choses doivent rester ouvertes à des fins exploratoires, le clinicien se soucie constamment de la pertinence des échanges et du travail, ce par quoi il stabilise les démarches et les expériences qui doivent être approfondies. Pour cela, il élucide la demande et les besoins du client en l'aidant à expliciter ses problèmes (État Présent) et à se représenter les résultats qu'il recherche (État Désiré), en privilégiant le versant subjectif et les possibilités d'action qui semblent s'offrir au sujet. Ces cadrages - essentiels en PNL du fait qu'ils donnent une base contractuelle au travail - se doublent souvent de « contrats de communication » de portée plus locale, qui permettent au praticien de discuter, de négocier et de préciser le sens de sa démarche.
A côté de ce travail explicite et contractuel, beaucoup de thérapeutes en PNL poursuivent également des objectifs de développement d'ordre plus général.
Ces objectifs - qui s'ajoutent en filigrane au travail strictement thérapeutique - renvoient implicitement à l'idéal humain qui sous-tend la PNL Ce qui, pour faire simple, implique l'acquisition des processus par lesquels la PNL développe l'ouverture et la flexibilité des individus, pour qu'ils disposent de plus de choix comportementaux et interprétatifs dans la vie.
Rechercher de l'information. Malgré l'importance qu'elle accorde à l'abord et à la compréhension phénoménologique de l'écoute du vécu du sujet, la PNL - nous venons de le voir -, réserve certains moments à des collectes systématiques de données destinées à élaborer ou à actualiser les Etats Présent et Désiré du patient. En dehors de ces moments, le clinicien n'a cependant de cesse d'enregistrer tout ce qui lui permet d'affiner sa compréhension de l'autre, par observation, questionnement, reformulations et simulations intérieures des processus qu'il voit et entend.
Analyser, interpréter et ordonner les informations récoltées afin de comprendre comment le patient élabore et transforme ses expériences. Ce qui, en pratique, requiert :
le décryptage syntactique
des mécanismes et
des structures psychologiques types qui
sous-tendent les dires et l'agir du patient,
l'interprétationde ces données en termes de ressources et de processus limitants, selon l'usage
que le sujet en fait,
leur positionnement dans la dynamique d'ensemble du sujet, en fonction des différences
observables entre son État Présent et son État Désiré,
l'exploration des hypothèses
et des solutions qui paraissent les plus fécondes.
Traduire l'analyse en diagnostic spécifique, fondé sur la sélection et l'articulation des fruits du travail précédent, de manière à préparer les décisions qui mèneront à l'action. Cette étape rarement évoquée et pourtant essentielle pour ne pas confondre collecte de données et cartographie de problèmes - s'obtient par abstraction à deux niveaux d'intelligibilité différents : l'un d'ordre analytique, qui concerne des processus factuels théoriquement isolables; l'autre, d'ordre synthétique et analogique, de portée plus clinique, qui spécifie la nature des problèmes en termes de structures-types ou de configurations de sens qui structurent les symptômes.
De plus, cette étape requiert une opérationnalisation en termes de solutions, en fonction des « niveaux logiques » qui dominent, mais aussi en tenant compte de l'état de la relation, de l'ouverture du client à l'égard de lui-même principalement au niveau de son ressenti , de son écologie et de la confiance qu'il a dans ses ressources. Ce qui, comme on s'en doute, requiert expérience, sens clinique et investissement du clinicien. En pratique, cette étape commence souvent par un échange avec le patient à propos du diagnostic, et se poursuit par une discussion relative aux stratégies thérapeutiques qui seraient à privilégier ou, en cas de manque, à inventer selon les besoins et principes fondamentaux de la PNL
Agir en PNL, c'est-à-dire poser une multitude d'actions qui visent, d'un côté, à favoriser l'engagement, l'ouverture et la compréhension du patient par rapport à lui-même et, de l'autre, à susciter et à mobiliser son inventivité, ses ressources et ses désirs pour qu'il dispose de nouvelles expériences de référence en accord avec son État Désiré. Les manières les plus originales dont la PNL structure ces changements sont à rechercher dans ses stratégies thérapeutiques, qui, pour la plupart, se caractérisent par les trois traits suivants : elles s'enracinent dans des métaphores qui, sous formes symboliques, exploitent la « psychogéographie » corporelle et spatiale, de même que les représentations sensorielles du sujet ; elles assurent différentes formes de médiation entre le sujet et ses ressources ; elles veillent à transférer les changements au dehors et dans le futur (futur-pacing), pour qu'ils ne restent pas enfermés dans le contexte de la consultation.
Evaluer. Si, comme il se doit, l'action thérapeutique s'inscrit dans une boucle de rétroactions continues, les actions de chacun doivent être évaluées régulièrement, par le praticien et, à certains moments, par le client. Et cela en distinguant : le vécu et les changements comportementalement observables chez le sujet, tantôt à propos de l'ici et maintenant de la consultation, tantôt à propos de ce qui se passe pour lui à l'extérieur, et cela en se fondant uniquement sur la comparaison du patient avec lui-même à travers le temps. Les actes du praticien sont eux aussi à juger à tout instant, à la fois, du point de vue de leur pertinence, de leur efficacité et de leur élégance au regard des objectifs, du modèle du monde et de l'écologie du client. En PNL les critères utilisés en cette matière sont très explicites et communiqués dès le début de la formation, en vue de favoriser le développement d'une conscience auto-évaluante chez le praticien.
Cet objectif est très important en PNL puisque les formations de base doivent veiller à ce que, dans tous les exercices, le praticien reçoive un feedback précis sur son travail. Dans les faits, cet objectif est toutefois rarement atteint, non seulement au niveau de la prise de conscience des mouvements affectifs qui naissent de ce que les psychanalystes appellent le « contre-transfert », mais aussi au niveau des processus cognitifs et comportementaux, des valeurs et des présupposés que le thérapeute mobilise quand il travaille. Quoique ce problème ait été plus d'une fois relevé par les fondateurs de la PNL, ne serait-ce que pour souligner la relativité des diverses versions de la réalité que l'on trouve en psychothérapie, sa persistance pourrait bien s'expliquer par le fait que les modélisations fondatrices de la PNL ont fait croire que l'« expertise » des grands thérapeutes qui l'ont inspirée pouvait s'apprendre par des règles, alors que, comme les souligne les frères Dreyfus, ceci n'est vrai que quand il est question de compétences, l'expertise véritable, dans quelque domaine que ce soit, dépendant par ailleurs de la pratique du métier, de la souplesse, de líéveil et d'un engagement personnel intense de la part de l'expert.
C'est sans doute à ces niveaux que les supervisions et les compléments de formation prévus pour devenir psychothérapeute trouvent leur véritable raison d'être.
M.Esser
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